Bonsoir!
Bonjour! Me souviens des sœurs qui nous apprenait comment écrire le arobas, le
@ elles voulaient pas nous dire à quoi ça servirait. Hier en regardant un documentaire sur mai
soixante-huit j’ai réalisé que les dés étaient pipés, que j’étais destiné à
devenir ce que je suis. Un pauvre assisté social, y’en avait pas d’avenir pour
moi mai soixante-huit c’était une supercherie. La révolution tranquille c’était
pour mon père pas pour moi, j’étais bon pour le moulin à viande. J’ai longtemps
essayé de suivre les mots d’ordre révolutionnaire des artistes, j’y suis pas
arrivé je suis devenus fou… Secondaire trois c’était déjà beaucoup plus que la
scolarité du patriarche, dans ma schizophrénie y’a un complot les animateurs
culturels sont à la solde d’Ottawa, fraichement sortis de la toute nouvelle
Université du Québec à Montréal on va avoir du monde pour gérer cette toute
nouvelle institution qu’est l’aide sociale… Je crois que je suis de la
troisième génération d’assisté, me souviens d’un patron qui m’avait conseillé
de retourner à l’université, j’en était incapable… Les « fous »
aujourd’hui sont disséminés dans la ville on les a sortis de l’asile pour les
loger dans des habitations à loyer modique… J’ai peur de vous écrire ça
pourtant c’est un constat, les pauvres et les malades se retrouvent toujours au
même endroit. En fait mon père était pas assisté, mais les prestataires ont
commencés dans sa génération, ensuite c’est moi et après ce sont mes enfants,
la pauvreté et la maladie ça semble héréditaire. J’entends d’ici cette femme
dire à une autre, « commande toé un chèque! ». J’ai rêvé peut-être
trop rêvé que j’allais devenir quelqu’un. Je sors de la douche, je le répète
faut jamais l’oublier que malgré la grande pauvreté on peut se laver quand on
veut… Le Québec a formé des gestionnaires de programme d’aide sociale, moi je
suis du bord des prestataires, je comprends pourquoi y’a des itinérants, quand
ils ont un appartement, ils se sentent envahis par des agents qui déplacent
délicatement les choses chez eux, ils préfèrent les dortoirs des refuges, je
sais pas si vous comprenez. Soixante et un ans presque soixante-deux je
retournerai pas sur le marché du travail, je vais continuer à rêver… C’est pas
tellement que j’ai pas voulu travailler c’est que j’ai pas pu… Je suis de ceux
qui sont nés pour un petit pain, un nègre blanc d’Amérique qu’on disait à une
autre époque. Je suis pas vraiment un lumpenprolétaire , je sais pas comment me définir, une espèce de
vieux voyous comme ils disent, un vieil anarchiste… Je pense aux vieilles
cabanes dans les bois de Val-Morin, je sais pas pourquoi, j’aimerais bien
passer quelques jours à la campagne pour faire un feu. Le climatiseur est
arrêté, y’a pas d’humidité. Je réfléchis un peu pour vous terminer ça sur une
bonne note, quand je travaillais je me voyais toujours ailleurs maintenant je
suis bien chez moi! Je termine en vous remerciant d’avoir lu jusque-là!!! À la
prochaine j’espère!!!
Bernard
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